La sororité

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À vous, les silencieuses, qui me lisez chaque semaine sans laisser de commentaire, mais dont la présence, même discrète, me touche profondément. À vous, les audacieuses, qui partagez pour ma plus grande joie vos pensées, que ce soit par écrit ou de vive voix, pour enrichir ce fil rouge tissé au quotidien. À celles que je connais personnellement, que j’ai serrées dans mes bras. À celles pour qui je ne suis encore qu’une plume, ou une voix.

Aux autrices – de fiction ou d’essais – qui, par leurs mots, donnent vie aux femmes et les placent au cœur de leurs récits et réflexions.

À ceux qui me lisent et partagent leurs réflexions sur ce fil. À ceux qui, loin de se laisser effrayer par le féminisme, l’embrassent fièrement en soutien aux femmes qu’ils aiment.

À mon mari, qui comprend que la sororité renforce notre complicité et nourrit notre relation. À mon fils, qui reprend à sa manière mon combat contre la misogynie de la langue et de la culture française. À ma fille, pour qui je travaille à construire chaque jour un monde empreint de sororité.

Aux femmes de ma famille, dont je m’inspire, en miroir ou en opposition, mais toujours avec compréhension et réflexion.

À mes amies, qui m’accompagnent avec bienveillance et douceur dans cette vie de femme.

À mes élèves, pour qui je crée des problématiques féministes et engagées.

À moi-même, qui chaque jour apprends à mieux me parler et à m’apprécier davantage.

Sororité Lison Novaretti
Cercle de femmes animé par Joëlle Rey et Pauline Arni, dans leur « cocon des mères-veilleuses ».

Vous l’aurez compris : dans cet article, je souhaite parler de la sororité, cette émotion qui trace un sillon lumineux dans le cœur des femmes. Un lien si puissant qu’il a, pendant des siècles, effrayé les hommes. Un lien qui est une source de soutien, de douceur et d’émulation.

💓 Le corps en écho : ressentir la sororité

Je souhaite vous confier les mots que j’ai écrits après ma première participation à un cercle de femmes, un instant suspendu où j’ai découvert toute la profondeur de cette émotion… Une expérience d’une communion intime où la vulnérabilité se transforme en force, et chaque parole, partagée sans jugement, devient une clé de guérison.

✍️ Hier soir, j’ai assisté à mon premier cercle de femmes auprès de Pauline et Joëlle. Quelle expérience ! C’était une parenthèse de douceur et de connexion – à moi-même et aux autres femmes du cercle -, un moment suspendu dans le temps, un moment de partages intimes tout en pudeur et en bienveillance.

Bien que je ne connaissais pas les autres participantes, après un léger moment d’appréhension, je me suis peu à peu sentie à ma place, libre d’être simplement celle que je suis. J’ai ressenti une intense connexion entre nous toutes et chaque histoire partagée a fait écho en moi. Je me suis sentie en sécurité physique et affective. J’ai pleuré, j’ai ri. Je suis passée par une riche palette d’émotions.

✍️ Aujourd’hui, je me sens libérée et confiante pour poursuivre mon chemin. Je suis heureuse de m’être offert ce cadeau de l’expérience de la sororité. Et je remercie encore Pauline et Joëlle pour leur douceur, leurs mots posés sur nos maux, leur accompagnement sur mesure pour chacune des femmes du cercle au sein même du groupe. Aujourd’hui, mon cœur déborde d’amour et de gratitude. Aujourd’hui, c’est le début de mon nouveau chemin de vie…

Après avoir vécu cette expérience en cercle, que j’ai ensuite renouvelée, j’ai eu la chance de recevoir un rituel rebozo (que je détaillerai bientôt dans un article sur la puissance). Ce rituel a été pour moi la prolongation de ce cheminement intérieur, un cadeau de sororité qui m’a apaisée et m’a reliée plus profondément à ce lien puissant. Je partage avec vous les mots que j’ai écrits avant de le recevoir :

✍️ Ce matin, j’accueille avec gratitude ce rituel rebozo offert avec générosité et amour par deux femmes extraORdinaires, aujourd’hui j’apaise mon corps et mon esprit. Ce matin, je me nourris de ces liens de sororité construits depuis des années avec Joëlle et Pauline et je me relie à elles, pour traverser tout cet océan d’émotions mêlées…

✨ Les messages que livre la sororité

Simone Media

La solidarité entre femmes

La sororité, c’est ce lien invisible que l’on ressent entre femmes, simplement parce que l’autre partage cette même expérience de féminité. C’est cette énergie qui circule spontanément entre deux femmes, qu’elles aient ou non des liens de sang. C’est une connexion profonde née de la compréhension commune du vécu féminin.

Grand reporter de guerre depuis 30 ans pour France Télévisions, Dorothée Ollieric (@dorothee_ollieric) explique dans un épisode du #SimonePodcast :

💬 Je pense que sur le terrain, être une femme, c’est un avantage, notamment pour avoir accès à d’autres femmes. Il y a cette espèce de connivence entre femmes qui joue énormément sur le terrain.

Elle revient sur sa carrière dans un livre autobiographique intitulé Maman s’en va-t-en guerre.

« Moi aussi » ou l’écho des expériences partagées

La sororité, c’est aussi cette reconnaissance de soi dans l’autre. C’est ce moment où, en entendant le récit d’une autre, une femme pense ou dit instinctivement : « Moi aussi ». Une résonance intime, une connexion profonde entre des vécus qui, bien que distincts, portent les mêmes échos.

Ce « Moi aussi » a pris une ampleur mondiale avec le mouvement Me Too, initié en 2006 par Tarana Burke et amplifié en 2017. Ce mouvement dénonce les violences sexuelles faites aux femmes et encourage les victimes à briser le silence. Il a déclenché une prise de conscience mondiale sur le harcèlement et l’impunité des agresseurs. Derrière ces mots se cache un cri de ralliement, non seulement pour une expérience partagée, mais aussi pour un appel à la justice et à la transformation collective.

« Je t’écoute » ou la force de la compréhension

Récemment, mon amie Mathilde m’a rappelé cette image : nous avons deux oreilles pour écouter et une seule bouche pour parler. Une belle façon de souligner l’importance de l’écoute. Parler, oui, mais surtout, offrir à l’autre l’espace et le temps d’être entendue.

C’est ce « Je suis là pour toi, sans jugement, je t’écoute, je te comprends » qui apaise et soutient. Ce regard bienveillant qui dit : « Ta parole est importante, ce que tu partages est précieux. Merci pour ce cadeau, je suis profondément touchée que tu te sentes en confiance pour déposer tout cela auprès de moi. »

🧭 Cette boussole intérieure : ce que la sororité nous apprend

Un engagement profond : une reconnaissance

L’une des plus belles expressions de la sororité se trouve, selon moi, dans la plaidoirie de l’avocate Gisèle Halimi lors du procès de Bobigny en 1972. Ce jour-là, elle défendait Michèle Chevalier, une mère accusée d’avoir aidé sa fille de dix-sept ans à avorter après un viol, ainsi que trois autres femmes considérées comme complices. À cette époque, l’avortement était interdit en France. Gisèle Halimi fit alors de ce procès un combat politique pour la dépénalisation de l’avortement, une lutte qui aboutirait trois ans plus tard avec la loi Simone Veil.

Ce qui frappe dans sa plaidoirie, c’est la puissance de l’identification qu’elle revendique. Elle ne se place pas seulement en avocate, mais en femme, en sœur de combat. Dès les premiers mots, elle affirme :

💬 Je ressens avec une plénitude jamais connue à ce jour un parfait accord entre mon métier qui est de plaider, qui est de défendre, et ma condition de femme.

Pour elle, la solidarité ne suffit pas à exprimer ce qu’elle ressent :

💬 Je ressens donc au premier plan, au plan physique, il faut le dire, une solidarité fondamentale avec ces quatre femmes, et avec les autres.

Et quand je dis « solidarité », je me demande si j’ai bien employé le mot juste, car qui dit « solidarité » dit « dualité », dit « lien profond », mais entre deux éléments distincts.

Or, ce que j’essaie d’exprimer ici aujourd’hui, c’est que je m’identifie précisément et totalement avec Mme Chevalier et avec ces trois femmes que la loi appelle des complices, avec ces femmes présentes à l’audience, avec ces femmes qui manifestent dans la rue, avec ces millions de femmes françaises et autres.

Elles sont ma famille.
Elles sont mon combat.
Elles sont ma pratique quotidienne.
1

Se relier aux autres : la puissance des petites attentions

Je me souviens d’une scène qui m’a marquée dans un petit restaurant en Corse du Sud, un jour de printemps. Une mère allaitait son bébé quand, après un bref échange avec le serveur, je l’ai vue se lever et s’installer à l’extérieur. Son attitude trahissait un malaise.

J’ai alors repensé à une petite carte que m’avait offerte mon amie Myriam, accompagnée d’un bijou lacté fait avec mon propre lait. Je l’ai sortie de mon portefeuille et la lui ai tendue.

Elle a lu ces mots avec attention, surprise. Puis, les larmes aux yeux, elle m’a remerciée. Je ne saurai jamais ce qui avait été dit avant, mais ce simple geste de soutien lui a donné la force de poursuivre son chemin, malgré ce qu’elle venait de vivre.

Les rituels de passage

La sororité se manifeste aussi à travers les rituels de passage qui marquent les grandes transitions de la vie. Comme le souligne Miranda Gray dans Lune Rouge. Les forces du cycle féminin

✍️ Le rite de passage constituait l’une des formes les plus anciennes par lesquelles initier un individu aux concepts et aux expériences. Cet événement symbolique ou rituel marquait pour lui la transition d’une phase de sa vie à une nouvelle phase de conscience et de perception. 2

Qu’il s’agisse des premières règles, de la maternité ou de la ménopause, ces expériences prennent une dimension plus forte lorsqu’elles sont partagées. Être accompagnée par d’autres femmes dans ces moments clés permet de mettre des mots sur ce qui nous traverse, d’apprivoiser les transformations de nos corps, et d’y puiser une force nouvelle.

Ainsi, ces rituels ne sont pas de simples traditions : ils incarnent un lien puissant de transmission et de solidarité. Grâce à eux, chaque transition devient une étape chargée de sens, où la sororité éclaire et soutient, transformant l’individuel en collectif.

🔍 Dans les coulisses de cet article : sororité et langue française

En tant que professeure de français, j’aime échanger avec mes élèves sur le sexisme dans la langue. En effet, derrière les règles de grammaire se cachent souvent des marqueurs idéologiques. Par exemple, la règle du « masculin l’emporte toujours sur le féminin » a été imposée au XVIIe siècle dans une logique sexiste. Avant cela, l’accord suivait d’autres principes : soit avec le mot le plus proche, soit avec le plus grand nombre.

En 1647, Claude Fabre de Vaugelas illustre bien cette conception ses Remarques sur la langue française. Son raisonnement en dit long sur la place des femmes dans la société de l’époque… et sur l’héritage qu’elle nous a laissé :

✍️ Le genre masculin, étant le plus noble, doit prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se trouvent ensemble. 

Preuve que la langue n’est pas un simple outil neutre de communication, mais un reflet des rapports de pouvoir.

À ce sujet, je vous recommande chaleureusement le podcast Parler comme jamais de Laélia Véron, ainsi que son livre Le français est à nous ! Petit manuel d’émancipation linguistique, coécrit avec Maria Candela. Dans leur chapitre « Masculinisation et féminisation du français : la langue comme champ de bataille », les deux enseignantes-chercheuses expliquent que :

✍️ La langue et la société ont un rapport dialectique : nous façonnons la langue, et la langue nous façonne, dans un va-et-vient perpétuel. Des études de psychologie cognitive ont montré que la langue influençait nos représentations mentales. 3

Revenons à mes élèves… Nos discussions prennent parfois une tournure inattendue ! Quand j’entends des filles dire « Ah, ça me casse les couilles ! », je m’insurge – non pas contre le gros mot, mais contre le choix du mot lui-même : « Pourquoi ne pas dire « ça me casse les ovaires » ? » Après tout, pourquoi toujours se référer à un corps masculin ?

De même, certaines s’interpellent par un « frère ». Là encore, je ne peux m’empêcher de réagir : « Mais non, vous êtes des filles, dites « sœur » ! » Des détails, en apparence… mais ces choix linguistiques façonnent nos imaginaires et nos identités.

La sororité, c’est aussi ça : rappeler aux filles qu’elles comptent, qu’elles sont puissantes, qu’elles ont le droit de se nommer et de s’affirmer. Leur existence ne doit pas être effacée, et ça commence à travers le langage.

📚 La sororité à travers les âges, entre histoire, littérature et sciences

🧐 Étymologie et histoire du mot sororité

Le mot sororité vient du latin soror (« sœur »), mais il a longtemps été éclipsé par fraternité, issu de frater (« frère »), consacré comme idéal universel de solidarité, notamment dans la devise républicaine Liberté, Égalité, Fraternité. Pourtant, cette fraternité, censée être inclusive, reflète un biais masculin.

Employé dès le XVIe siècle pour désigner une communauté de femmes (François Rabelais en parle dans son Tiers Livre), sororité est resté en marge avant d’être réinvesti au XXe siècle par les mouvements féministes, en écho au sisterhood anglophone. Il ne s’oppose pas à la fraternité, mais en dévoile l’angle genré et souligne la nécessité d’une solidarité spécifiquement féminine face aux inégalités systémiques.

Aujourd’hui, le terme adelphité, tiré du grec adelphós (« frère/sœur »), émerge comme une alternative plus inclusive, dépassant les distinctions de genre.

✨ Sorcières, sœurcières

Aujourd’hui, certaines femmes préfèrent parler de sœurcières plutôt que de sorcières. Ces deux termes n’ont en effet pas la même origine : sorcière vient du latin sors, sortis, qui signifie « sort, tirage, destinée ». À l’origine, la sorcière était donc celle qui lit ou influence le destin – un rôle ambigu, souvent perçu négativement.

Dans de nombreuses traditions, ces femmes étaient des guérisseuses, des sages-femmes ou des passeuses de savoir, profondément connectées à la nature. Leurs noms varient selon les cultures : chamane en Mongolie, femme-médecine en Afrique et en Amérique, guérisseuse en Europe. Mais l’histoire, marquée par la peur et le contrôle des savoirs féminins, a peu à peu diabolisé leur rôle.

De Circé à Baba Yaga, des sorcières de Pendle à Ambre la guérisseuse, en passant par la sorcière dans Hansel et Gretel et la méchante reine dans Blanche-Neige, ces figures féminines aux pouvoirs mystérieux fascinent depuis toujours : tantôt redoutées, tantôt admirées, elles hantent contes, mythes et récits modernes…

Mona Chollet, dans Sorcières. La puissance invaincue des femmes, montre comment ces figures ont été diabolisées précisément parce qu’elles incarnaient une indépendance et une force collective redoutées des sociétés patriarcales.

Le roman Les Sorcières de Pendle de Stacey Halls illustre bien cette réalité à travers l’histoire d’une jeune femme, Fleetwood Shuttleworth, qui découvre qu’Alice Gray, une sage-femme accusée de sorcellerie, pourrait être la seule à pouvoir sauver sa vie et celle de son enfant à naître. Inspiré du procès des sorcières de Pendle en 1612, ce récit met en lumière la persécution des femmes, souvent issues des classes populaires, accusées à tort et sacrifiées sur l’autel de la peur et du pouvoir.

🤝 Sororité, fraternité et féminisme

La sororité a longtemps été invisibilisée avant d’être réinvestie en réaction aux oppressions subies par les femmes.

Comme l’écrit Guy Bechtel :

✍️ Aucun groupe au monde ne fut jamais si longtemps et si durement insulté. 4

Marginalisées, diabolisées, privées de pouvoir, les femmes ont dû puiser leur force dans l’union. La sororité n’est pas qu’un simple pendant de la fraternité : elle est un acte de résistance, une riposte à un système qui divise pour mieux régner.

Mais cette lutte ne concerne pas que les femmes. Les hommes aussi ont un rôle à jouer. La sororité ne les exclut pas : elle leur tend la main pour questionner un système fondé sur la domination et l’opposition. Soutenir la sororité, et plus largement le féminisme, c’est choisir l’émancipation collective.

Virginie Despentes le rappelle avec force dans sa conclusion de King Kong Théorie :

✍️ Le féminisme est une aventure collective, pour les femmes, pour les hommes, et pour les autres. Une révolution, bien en marche. Une vision du monde, un choix. Il ne s’agit pas d’opposer les petits avantages des femmes aux petits acquis des hommes, mais bien de tout foutre en l’air. Sur ce, salut les filles, et meilleure route…  5

📜 Citation

J’écris des livres comme ceux-ci pour me donner du courage. Dès lors, je mesure l’importance galvanisante des modèles identificatoires. […] quand il s’agit de faire sienne la force de quelqu’un, le contact avec une image, une pensée, peut suffire à produire des effets spectaculaires. Dans cette façon qu’ont les femmes de se tendre la main, de se faire la courte échelle – de façon délibérée ou à leur insu -, on peut voir le contraire parfait de la logique du « plein la vue » qui régit les rubriques people et d’innombrables fils Instagram : non pas l’entretien d’une illusion de vie parfaite, propre uniquement à susciter l’envie et la frustration, voire la haine de soi et le désespoir, mais une invite généreuse, qui permet une identification constructive, stimulante, sans tricher avec les failles et les faiblesses. 6

Sorcières. La puissance invaincue des femmes, Mona Chollet

🔬 Les bienfaits scientifiques de la sororité

Biologie et neurobiologie

Certaines recherches en biologie suggèrent que la sororité pourrait avoir des bases biologiques profondes. Par exemple, des études en neurobiologie montrent que les interactions bienveillantes entre femmes favorisent la libération d’ocytocine, l’hormone du lien social. 1 Cette hormone joue un rôle clé dans la réduction du stress, le renforcement des liens sociaux et des sentiments de confiance et d’appartenance. Ce phénomène est souvent observé dans des groupes féminins à travers l’histoire et dans différentes cultures, où les femmes s’organisent en réseaux de soutien, notamment pour les soins des enfants, la transmission des savoirs et l’entraide.

1 Crockford, C., Deschner, T., & Wittig, R. M. (2018). The Role of Oxytocin in Social Buffering : What Do Primate Studies Add?. Current topics in behavioral neurosciences, 35, 155–173. https://doi.org/10.1007/7854_2017_12

Anthropologie et sociétés matrilinéaires

En anthropologie, certaines théories suggèrent que les femmes vivant en communauté synchronisent souvent leurs cycles menstruels, ce qui pourrait indiquer une connexion physiologique et énergétique entre elles. De plus, dans les sociétés matrilinéaires, comme les Minangkabau en Indonésie et les Mosuo en Chine, les femmes jouent un rôle central dans la structure familiale et sociale, illustrant une forme institutionnalisée de sororité où les femmes sont les piliers de l’organisation sociale.

Psychologie sociale et résilience

Du côté de la psychologie sociale, des recherches ont démontré que les environnements sororaux renforcent la résilience individuelle et collective, notamment face aux violences et discriminations. Les cercles de parole entre femmes, par exemple, montrent un pouvoir thérapeutique, favorisant une meilleure estime de soi et un sentiment de puissance collective.

Limites et perspectives

Cependant, il est important de noter que les preuves scientifiques sur ces sujets sont encore limitées. Bien que des liens entre biologie, psychologie et sororité soient suggérés, ces mécanismes restent partiellement compris par la science…Mais l’essentiel n’est-il pas de vivre cette sororité, de l’expérimenter au quotidien et de ressentir ses effets dans nos vies ? Comme l’a si justement dit Antoine de Saint-Exupéry dans Le Petit Prince :

✍️ On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux.

🛠️ L’anti-guide d’application de la sororité

Les Grandes Vies. Gisèle Halimi. Écrit par Jessie Magana et illustré par Eloïse Heinzer. Gallimard Jeunesse. 2018. Page 55.

Je pourrais vous livrer une belle recette, avec des ingrédients et des étapes bien précises :
➤ Créez des espaces d’écoute et de partage.
➤ Soutenez les projets des autres femmes.
➤ Pratiquez l’entraide et la coopération.
➤ Combattez les stéréotypes et la compétitivité féminine.
➤ Soyez un modèle de solidarité et de bienveillance.

Je pourrais vous encourager à intégrer la sororité dans vos interactions quotidiennes, en étant bienveillante, respectueuse et prête à défendre les droits des femmes. À montrer l’exemple, pour inspirer les autres à adopter une attitude solidaire.

Oui, mais…

Il n’existe pas de mode d’emploi universel pour se relier aux autres, et encore moins de règles figées à suivre à la lettre. Le seul véritable guide, c’est vous. Vos sensations, vos émotions, ce qui résonne en vous. Au fond, chacune sait intuitivement ce qui est juste pour elle.

La sororité ne signifie pas forcément s’entendre avec toutes les femmes ni ressentir une connexion immédiate avec elles. Nous pouvons nous sentir plus proches d’une amie que de notre propre sœur, tout comme il peut nous arriver de ne pas nous reconnaître du tout dans une autre femme. Ce lien n’a rien d’automatique ni d’obligatoire. L’important est d’écouter ses ressentis, de respecter ce qui est fluide et juste pour soi, sans se forcer.

Rappelons-nous aussi que rien n’est figé : nous évoluons au fil de nos expériences, et nos relations changent avec nous. Une connexion évidente aujourd’hui peut s’effacer demain, et inversement, un lien inattendu peut se tisser avec le temps. Comme une danse, une relation se construit à deux, dans un mouvement perpétuel. Accepter cette dynamique, c’est laisser aux liens humains la liberté de respirer et de se transformer.

Et parfois, les relations les plus difficiles sont aussi celles qui nous en apprennent le plus sur nous-mêmes.

Et surtout…

Une relation apaisée avec les autres commence toujours par une relation apaisée avec soi-même. Plus nous nous écoutons, plus nous nous respectons, plus nos liens avec les autres deviennent fluides et authentiques. L’important n’est donc pas d’appliquer des principes extérieurs, mais de revenir à soi, encore et encore, pour tisser des relations qui nous ressemblent vraiment.

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  1. Plaidoirie pour l’avortement, Gisèle Halimi, Folio, pages 14-15. ↩︎
  2. Lune Rouge. Les forces du cycle féminin, Miranda Gray, Macro Editions, page 238. ↩︎
  3. Le français est à nous ! Petit manuel d’émancipation linguistique, Maria Candea et Laélia Véron, La Découverte, Paris, 2019, page 118. ↩︎
  4. Les Quatre Femmes de Dieu. La putain, la sorcière, la sainte et Bécassine, Guy Bechtel, Plon, Paris, 2000. ↩︎
  5. King Kong Théorie, Virginie Despentes, Le livre de poche, page 145. ↩︎
  6. Sorcières. La puissance invaincue des femmes, Mona Chollet. Editions La Découverte, Paris, 2018, pages 39-40. ↩︎

12 réponses à “La sororité”

  1. Avatar de Isabelle Martinez

    Merci pour cet article très complet. C’est rare une article sur la sororité. Il me semble même que c’est la première fois que j’en lis un. Je l’ai vécu et ressenti lors d’un festival du féminin à Paris et cela m’a vraiment fait ressentir ce lien précieux et sacré.

  2. Avatar de Béa🌷

    Merci Lison pour ton article inspirant. Je ne connaissais pas le terme sororité cependant l’importance des liens authentiques et du soutien mutuel entre femmes résonne profondément en moi. Les relations bienveillantes sont essentielles pour grandir ensemble et s’épanouir pleinement. Merci encore pour ce partage enrichissant.

  3. Avatar de Rémi

    Ton article sur la sororité est profondément touchant et puissant. J’aime la manière dont tu explores cette émotion comme un fil lumineux qui unit les femmes, que ce soit dans le soutien, la compréhension ou l’émulation. Les messages de solidarité et d’écoute résonnent profondément, et la manière dont tu relis la sororité à l’histoire, la langue et la science est fascinante 😉

  4. Avatar de Camille Sanchez

    Quel article magnifique empli de bienveillance et de reconnaissance ✨
    J’ai beaucoup apprécié te lire et les témoignages sont tellement enrichissants 🙏🏼
    J’ai eu la sensation de me laisser transporter par ton écrit et cela m’a énormément apaisé 😊 Merci beaucoup pour ce moment précieux 🚀

  5. Avatar de Joëlle Rey
    Joëlle Rey

    Merci beaucoup ☺️ j’ai lu avec attention et émotion 💗cet article! Tous ces moments de sororité sont gravés dans mon cœur!❤️ Ces liens tissés de femmes à femmes, pour prendre soin et se soutenir, transmettre, grandir, avancer, me fascinent et me comblent de gratitude!🙏✨

    1. Avatar de Lison Novaretti

      Oh merci beaucoup d’avoir pris le temps de le lire et pour ton retour si touchant, Joëlle ! ☺️💓 Ces moments de sororité ont été d’une intensité incroyable… Ils resteront également gravés en moi, mille mercis de m’avoir permis de vivre cette sororité à vos côtés…
      Et le rituel rebozo mérite bien un prochain article, sur la puissance qu’il incarne. 😇✨ Je me réjouis de le partager avec toi…

  6. Avatar de De Gea Isabel
    De Gea Isabel

    Waouh quel beau et immense travail sur ce que l’on ressent , ce que l’on vit ,ce que l’on partage entre femmes au quotidien, sans arriver à l’écrire… Tu l’as fait !👍🏼🙏🏼🙏🏼🙏🏼
    Merci pour me l’avoir partagé, je vais m’en nourrir, m’en imprégner….
    Isabel

    1. Avatar de Lison Novaretti

      Oooh merci pour tes mots qui me touchent en plein cœur, Isabel ! 💓 Nos échanges m’ont nourrie et inspirée, et je suis infiniment reconnaissante pour tout ce que tu as partagé. Merci pour ces discussions précieuses sur les femmes, merci aussi pour les découvertes que tu m’as permises de faire. 💫✨

  7. Avatar de Jackie
    Jackie

    C’est comme tisser une toile de solidarité et de soutien entre femmes, où chaque fil renforce l’autre. Dans cet article, tu explores avec profondeur et sensibilité les liens puissants qui unissent les femmes et les rendent plus fortes ensemble. La sororité est une force inestimable pour surmonter les défis et célébrer les victoires. Merci pour ton partage qui nous rappelle l’importance de la solidarité féminine et nous encourage à cultiver ces précieux liens.

  8. Avatar de Sylvie

    Merci pour cet article inspirant ! Ta « recette » résonne beaucoup avec ce que je vis déjà grâce au blogging et à mes partenaires de blog. Chaque semaine, on se retrouve entre nous pour partager nos avancées, s’entraider face aux difficultés, se donner des idées… mais aussi parler de nos vies perso. Ces moments sont précieux, ils font un bien fou et nourrissent cette belle sororité dont tu parles si bien.

  9. Avatar de Mathilde
    Mathilde

    Merci Lison de décrire cette émotion si puissante. C’est précieux et si nécessaire…
    Les cercles de femmes continuent de vivre en moi, surtout le premier.
    On m’a partagé aujourd’hui une expérience de fausse-couche qui a été complètement banalisée par l’entourage (mère, tante…). Je crois qu’elle n’a même pas osé pleurer alors que son bébé venait de la quitter pendant qu’elle allait aux toilettes. Un espoir tant attendu qui venait de s’en aller. Personne ne l’a prise dans ses bras. J’aurais aimé être là pour elle.
    J’ai senti la puissance de la sororité, la puissance de l’accueil que l’on peut se réserver. J’ai versé une larme avec elle, je lui ai dit que c’était un vrai deuil, que je le connaissais. J’ai lu dans ses yeux le soulagement de se sentir entendu et comprise.
    Une autre qui m’a dit avoir avorté car elle ne se sentait pas prête à devenir maman… avec elle aussi j’ai versé une larme.
    Oui, je vous comprends, je suis votre soeur, je vous soutiens, je sais ce que c’est d’être une femme. La sororité est une force à déployer entre nous.
    Je t’embrasse Lison 💛

  10. Avatar de Elise d'OptimismeCool

    Merci pour cet article vibrant : c’est rare les sujets sur la sororité sous toutes ses formes. J’aime particulièrement cette reconnaissance envers celles qui soutiennent, écoutent et partagent, qu’elles soient visibles ou discrètes. Il est puissant de rappeler que la sororité ne se limite pas aux liens de sang, mais qu’elle se tisse dans chaque geste de solidarité. Et si nous osions, nous aussi, cultiver ces liens au quotidien, sans attendre d’occasion spéciale ?

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